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Lettre à un routier


             Versailles, le 20 décembre 2013

                                              

 

                                                                                               Cher routier,

 

   J’espère que ces premiers mois t’ont apporté plus d’espérance que de déception, tant à la route que dans le cours de ta vie quotidienne ! Ensemble, nous avons parcouru les chemins de Chartres et de Vézelay, écouté des hommes de conviction lors de nos conférences de clan, rendu service à notre paroisse, et vécu des moments plutôt sympas ensembles. Du moins, j’ose l’espérer …  Peut-être t’es-tu décidé à venir à la route avec entrain. Peut-être parce qu’un autre y était. Peut-être encore, parce qu’il fallait bien faire quelque chose. Peut-être en traînant un peu des pieds (je sais exactement qui esquissera un sourire un lisant cette dernière phrase).

 

   Souviens-toi de Vézelay. Nous nous y étions dit que la route était un chemin de sainteté, parmi d’autres. Je te rappelle cette phrase de Benoît XVI : « Le monde a besoin de vies transparentes, d’âmes claires, d’intelligences simples Â». Si tu fais mémoire de ta journée d’hier, des mois qui ont précédé celui-ci, ou encore des dernières années de ta vie, peut-être pourrais-tu y lire ce qui t’a porté, ce qui t’a rendu heureux et au contraire, ce qui ta déçu.

 

   Le thème de la route d’été doit maintenant t’interpeler, selon les mots empruntés à José Paulo : « Nous sommes en traversée. Ton sang dans tes veines ignore l’immobilité, c’est pour cela que tu vis Â». Le sang boue dans nos veines. Nous aimerions partir au grand large, porter secours et assistance à des peuples entiers, faire un tour de Méditerranée en 4L, découvrir l’Europe de l’Est en interRail. Nous sommes jeunes, donc encore loin du terme de notre existence, a priori. Et jeunes, nous avons pour nous d’avoir du temps devant nous et de l’énergie. Mais donnons-nous du temps au temps ? Ecoute ce que dit l’écrivain Marguerite Yourcenar : « J’aime que le temps nous porte, et non qu’il nous entraîne Â». Donne-toi de veiller plus que de te précipiter. Nous n’aurons pas dans l’immédiat toutes les réponses que nous aimerions avoir aux inquiétudes, aux angoisses, aux questionnements de notre existence. Qu’il serait rassurant de savoir sa foi établie sur quelque chose de certain, d’avoir une conviction familière qui nous porte, une expérience forte qui nous apporte confiance et paix ! Toutefois, jeunes, nous pouvons faire l’expérience du doute. La foi peut ne plus nous porter et nous laisser perplexe. Tout paraît évident par moment, quand on nous explique les choses ou dans la fièvre d’un groupe de prière, par exemple. Mais après, quand je traverse seul ma semaine, l’évidence peut disparaître. Nous le savons, ce silence a quelque chose de déroutant. Je cite une phrase que j'ai entendue de l’homélie du père Delort-Laval, dimanche dernier : « si nous consentons au silence avec ce qu'il a de vertigineux, si nous demeurons là alors que plus rien ne nous porte, nous faisons l'expérience d'une Présence. Â»  Voici ce qu’en dit Saint Augustin, chercheur de Dieu, peut-être sans le savoir, pendant sa jeunesse : « Je T’ai cherché partout à l’extérieur de moi-même, alors que Tu étais plus intime à moi-même que moi-même Â».

 

   Profite de ce que la route peut t’apporter comme temps, comme rencontres, comme itinéraires pour que tu puisses y saisir une occasion d’approfondir ta foi, d’y exercer ta liberté réalisatrice. Pose-toi donc bien cette question : ce temps qui t’est donné, le retrouveras-tu en d’autres circonstances ? Quelle réponse apportes-tu au défi qu’est l’existence ?  Fais de ta vie un chemin dont tu ne connais pas les étapes, mais où ta marche est sûre parce que tu sais que Dieu est avec toi.

 

   Cet été, Assise et Rome nous appellent. Assise, lieu de départ de l’ordre de Saint François. Rome, lieu du témoignage des premiers chrétiens. Même si tu n’auras pas l’occasion d’y marcher, que cette nouvelle année soit pour toi l’occasion d’apprendre à marcher vers le Ciel, avec ce qu’elle aura joies et de tristesses.

 

Dans la joie de Noël, 

 

Foulques CC

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